Faut-il encore suivre la règle du kilo de sucre par kilo de fruits pour faire sa confiture ? Un spécialiste démêle le vrai du faux.
Réaliser une confiture maison n’a rien de sorcier : quelques fruits, du sucre, une cuisson bien menée et le tour est joué. Pourtant, au moment de peser les ingrédients, le doute s’installe. La vieille règle du « un pour un » – un kilo de sucre pour un kilo de fruits – semble gravée dans le marbre, héritée des traditions familiales.
Mais ce dosage classique, s’il assure une excellente conservation, est-il réellement optimal en termes de goût et de texture ? Pas forcément, selon les experts. Pour y voir plus clair, mieux vaut écouter ceux qui ont fait de la confiture leur métier.
Stéphan Perrotte, élu Meilleur Confiturier de France en 2014 puis sacré Champion du Monde en 2015, en sait long sur les fruits et leur transformation. Pour lui, chaque confiture est une alchimie unique, dépendant du fruit, de sa maturité, de son acidité… et d’un bon sens affûté.
« Un kilo de sucre pour un kilo de fruits ? Ce n’est pas une règle absolue », confie-t-il au site 750g. Il préfère ajuster ses proportions en fonction de chaque préparation. Finies les formules rigides : place à l’intuition et à l’écoute attentive des fruits.
Trop de sucre dans les recettes d’autrefois ?
Ce fameux ratio a longtemps été un réflexe transmis de génération en génération. Mais son origine est plus pratique que gustative. « À l’époque, les grands-mères utilisaient autant de sucre que de fruits pour garantir la conservation. Le sucre jouait un rôle de conservateur essentiel à la fin de la cuisson », explique l’artisan.
Avant l’avènement des pots stérilisés et des couvercles hermétiques, le sucre était la seule protection fiable contre les moisissures. On atteignait parfois des teneurs en sucre de 65 à 70 % dans le produit final.
Aujourd’hui, les méthodes de conservation ont évolué. Il est donc possible de réduire la quantité de sucre sans compromettre la durée de vie de nos pots maison. Le sucre devient alors une variable d’ajustement, non plus une contrainte.
Peut-on réduire le sucre sans altérer la confiture ?
Bonne nouvelle : oui, on peut faire de délicieuses confitures en diminuant significativement le sucre. « On peut descendre à 600 ou 650 grammes de sucre par kilo de fruits et obtenir un très bon résultat », assure Perrotte.
Mais attention : plusieurs facteurs influencent le résultat final – le type de fruit, sa teneur en eau, sa maturité, et même la saison de récolte. Chaque ingrédient joue un rôle.
Et si l’on cherche à alléger encore plus ? Là, la tâche se complique. Moins de sucre signifie davantage d’eau, donc des cuissons plus longues… et plus de risques de rater sa préparation. « Le fruit est composé à 90 % d’eau, alors que le sucre apporte de la matière sèche. Moins de sucre = plus d’humidité », précise-t-il.
Le risque : devoir surcuire pour compenser ou recourir à des additifs moins naturels. « Alléger en sucre, cela peut vouloir dire ajouter des éléments qui dénaturent la recette », regrette l’expert. Moralité : mieux vaut viser l’équilibre que la privation.
En somme, pour réussir sa confiture maison, il ne s’agit pas de suivre aveuglément les règles du passé, mais de s’adapter, goûter, tester… et se faire plaisir avec un produit à la fois savoureux et équilibré.